Marina Sirtis 11 juillet 2008 Interview de Marina Sirtis
(Deanna Troi)
 
Depuis la fin de Star Trek - La Nouvelle Génération en 1994, Marina Sirtis a eu la chance de reprendre son rôle dans la peau du conseiller Deanna Troi tant au cinéma qu'à la télévision. Elle a eu l'heureuse surprise de pouvoir revenir sur les plateaux de tournage de Star Trek de la Paramount, notamment pour une série d'apparitions dans Star Trek - Voyager.
 
MS : « Auparavant, personne n'avait fait de gorges chaudes à propos de ma participation à la saga, alors ce fut une belle surprise, dit-elle. Et j'ai toujours pensé qu'il serait vraiment difficile d'incorporer à la quatrième série des personnages des précédentes dans la mesure où Voyager, précisément, est perdu dans l'espace. »
 
Le temps de l'émotion
 
Marina se sentait aussi euphorique à l'idée de rejouer Troi que navrée que ce soit fini.
 
MS : « Je suis épuisée, je sens encore peser sur moi cette sorte de dépression post-Star Trek... Tourner dans Voyager me rendait un peu nerveuse, car revenir en arrière est difficile, comme de se retrouver dans les vedettes invitées d'une série après avoir été un des personnages récurrents... Mais j'ai quand même eu le sentiment de vivre un retour aux sources. »
 
Dans Voyager, elle apparaissait aux côtés de Dwight Schultz, mieux connu sous le nom de Reginald Barclay. Elle aide le Lieutenant désemparé à gérer son obsession pour l'équipage de l'U.S.S. Voyager NCC-74656, lui qui tente par tous les moyens de faciliter son retour dans le quadrant Alpha.
 
Deanna Troi - Voyager MS : « J'en revenais à mon rôle fondamental de Conseiller. Une bonne chose, car je n'en avais plus eu l'occasion depuis Générations, et cette scène avec Patrick, quand il me parle de l'incendie où a péri sa famille... Dans les longs métrages, j'étais excitée par l'évolution de mon personnage, auquel on avait greffé toutes ces facettes. Du coup, Deanna pouvait être drôle, détendue et mignonne. Alors que je tournais mes scènes avec Barclay – un véritable retour aux sources de mon personnage, là aussi, au temps de La Nouvelle Génération, j'ai réalisé que tout cela m'avait manqué. Je ne me suis jamais vraiment retrouvée sur la passerelle de Voyager, et cela en faisait une sorte d'expérience surréelle. N'étant pas en contact avec les personnages de Voyager, j'ai eu l'impression bizarre de travailler encore pour La Nouvelle Génération. C'était le vieil équipage avec lequel j'avais tourné pendant des années et un acteur avec qui j'avais beaucoup collaboré. »
 
Mais elle aurait également apprécié avoir affaire à la nouvelle distribution.
 
MS : « A mon avis, il y a des acteurs extrêmement intéressants et très talentueux. J'adorerais par exemple que Kate [le Cpt Janeway] me donne la réplique. Son personnage est d'une grande force dramatique. »
 
Un retour facile
 
Après une si longue absence, était-il ardu de revenir sur le devant de la scène jouer Troi ?
 
MS : « Non, assure Marina. En fait, cela s'est avéré très facile. Elle est et sera toujours en moi. Pour être honnête, tourner dans les films était un peu moins facile. En lisant le script de Premier Contact, le côté amusant de Troi m'a plutôt inquiété. Depuis le début, j'avais opté pour un abord grave, dans mon interprétation. Mais par chance, avant de tourner, je venais de finir une pièce de théâtre cocasse. Et j'ai découvert que je pouvais encore verser dans la veine comique. J'avais gardé le sens du rythme. Sans cette expérience bénéfique, j'aurais été pétrifiée ! Il est plus dur de jouer Deanna Troi quand on a insufflé de nouvelles facettes au personnage. Car il faut montrer avant tout que le conseiller que le public connaît si bien n'a pas changé à ce point, et qu'au fond, Deanna est restée fidèle à elle-même. Elle agit d'une autre façon, voilà tout. Le côté facile, c'est d'en revenir à Troi telle qu'elle était. »
 
Avec l'arrivée des longs métrages, Marina fut enchantée de revoir ses amis et de reprendre leur travail d'équipe.
 
Deanna Troi - Premier Contact MS : « Je suis ravie de l'orientation que Troi a prise. D'ailleurs, je militais pour cela depuis quelque temps déjà : je m'efforçais de rendre Deanna Troi plus vive et enjouée, plus amusante... Mais cela ne marchait pas. Dès que j'essayais d'injecter un peu de comique à certaines scènes, Jonathan [Frakes] se contentait de me lancer un regard en me demandant d'arrêter. Beaucoup de réalisateurs avaient le sentiment que c'était Troi tout craché, et qu'il n'y avait pas à en dévier. Mais dans Premier Contact la scène de soûlerie a été tellement bien reçue par les fans que tout le monde a réalisé que Deanna Troi pouvait être très drôle, au lieu de rester ce personnage si grave, entièrement tourné vers le cérébral. »
 
Dans Star Trek – Insurrection, l'idylle avec William Riker est revenue sur le devant de la scène.
 
MS : « J'aime bien la façon dont cela a été amené, reprend Marina. C'était assez amusant, au lieu d'être sérieux, mièvre et mélodramatique. Et à mon avis, cela convient parfaitement aux deux personnages. » 

Naturellement, à l'ouverture du film suivant, Star Trek - Némésis, nous voyons l'heureux couple se marier devant ses collègues et amis de l'U.S.S. Enterprise.

Deanna Troi - Mariage Némésis

La griffe de Roddenberry
 
Dans certaines sphères, Insurrection n'est pas considéré comme un succès comparable à celui de Star Trek – Premier Contact
 
MS : « Les Trekkers authentiques ont adoré ce film parce qu'il portait vraiment la griffe de Gene Roddenberry! Argumente Marina. Majel [Barrett Roddenberry] l'adorait aussi parce qu'elle avait le sentiment que Gene en personne aurait pu l'écrire. C'était du Star Trek pur sucre dans son concept fondamental, donnant beaucoup à réfléchir. Il ne s'agissait pas à la base d'un film d'action et après Premier Contact nombre de fans ont dû être déçus, en fait, par l'approche bien plus cérébrale de l'intrigue. Cela dit, être objective est très dur pour moi dans la mesure où je n'ai eu que du bon temps pendant le tournage. Alors en somme, je suis mal placée pour en juger. Analyser objectivement une oeuvre à laquelle il a pris part est très difficile pour un artiste, vous savez. La plupart du temps, on se voit à l'écran, avec tous ses défauts, et on se plaint d'avoir un long pif ou quelque chose comme cela ! »
 
Plus tard, Marina a avoué qu'elle trouvait ardu de retourner à une vie normale sans LNG. Et revenir sur les plateaux de Voyager fut pour elle un véritable retour dans le passé.
 
MS : « J'en ai eu le coeur serré. Vraiment! Je me promenais autour des plateaux de tournage, je n'avais aucune envie de rentrer chez moi en voiture. Cela faisait tellement partie de ma vie ! Et les années qui ont suivi, je crois que j'ai eu du mal à m'en détacher émotionnellement. Depuis Insurrection, je me disais que je devais m'y résigner, c'était vraiment fini cette fois. Il fallait que je pense à ma propre vie et à la suite de ma carrière. »
 
Deanna Troi - Episode pilote STNG Des personnages familiers
 
En décrochant le rôle de Deanna Troi dans Star Trek – La Nouvelle Génération, Marina ne savait presque rien de la série.
 
MS : « Je ne connaissais rien en dehors des personnages, ce qui est d'ailleurs assez étonnant avec Star Trek. On peut n'avoir vu aucun épisode et savoir pourtant qui sont les personnages d'origine. J'avais vu Retour Sur Terre juste avant mon audition, mais ce n'est pas à ce film que je devais mon savoir. Je connaissais déjà les personnages parce qu'ils font partie de la culture populaire. »
 
Bien sûr, LNG était une toute nouvelle série, et Marina était libre de réfléchir par elle-même au personnage de Troi.

MS : « Je suis allée voir Gene pour lui parler de ce qui, à mon avis, avait pu influencer Troi dans sa vie. Il m'a encouragé dans cette voie. Les scénaristes jettent sur le papier les grandes lignes de leurs personnages. C'est ensuite aux acteurs de remplir les blancs et de mettre les points sur les i... J'ai donc concocté un arrière-plan pour le personnage de Deanna. Pour un comédien, c'est d'ailleurs une démarche obligée. Il faut réfléchir à la façon dont celui ou celle qu'on interprète va réagir dans une situation donnée. Et cette approche dramatique est basée sur l'éducation, l'enfance et, bien évidemment, la personnalité. Surtout quand j'ai commencé à tourner des épisodes avec la mère de Troi, j'ai puisé mon inspiration dans ma vie privée, afin de mieux déterminer comment Deanna réagirait face à certaines choses. »

Deanna Troi - Equipage de Star Trek Nouvelle Génération

Un rôle modifié

C'est bien connu, Gene Roddenberry avait décidé d'échanger les rôles d'officier de la sécurité et de conseiller entre Marina et Denise Crosby avant le tournage. Jouer l'autre rôle aurait-il plu à Marina ?
 
MS : « Eh bien, j'ai adoré interpréter Troi, en vérité. Gates [McFadden] et moi avons fini par être les deux seules femmes de la distribution, et nous étions toutes deux dans des professions à vocation sociale. Alors, voir une fille jouer un rôle typiquement masculin aurait été bien. L'autre bon point, c'est que j'aurais été le patron de Michael Dorn ! Le mener à la baguette pendant des années aurait été fabuleux! »
 
Les premiers temps, Marina ne s'est pas sentie à l'aise dans la peau de Troi parce que les écrivains ne faisaient pas grand cas du conseiller de I'Enterprise. Et sur ce plan, ce ne fut pas avant la deuxième saison que les choses commencèrent à s'améliorer.
 
MS : « Le tournant crucial, pour mon personnage, fut l'épisode d'ouverture de la deuxième saison, "L'enfant". J'avais passé la première saison à faire partie du décor, pour ainsi dire, sans jamais véritablement prendre part à l'action parce que les scénaristes ne savaient pas quoi faire du conseiller Troi. Et puis cet épisode est enfin arrivé, permettant à Troi d'entrer dans la lumière... Pour la première fois, on découvrait d'autres facettes de mon personnage. Troi avait la force de s'opposer à des gens comme Worf, qui aurait voulu qu'elle avorte, sans pour autant gommer toute douceur en elle. C'était le premier épisode à m'offrir vraiment la chance de montrer l'étendue de mon talent. Après la saison initiale, bourrée d'incertitudes, qu'on nous donne enfin notre chance, à mon personnage et à moi-même, a énormément compté à mes yeux. »

Marina considère-t-elle aujourd'hui que les capacités empathiques du Conseiller Deanna Troi sont ce qui a gêné les scénaristes, inhibant leurs élans créatifs ?

MS : « La plupart du temps, cet aspect de mon personnage était plutôt traité par-dessus la jambe. On n'en faisait pas cas. D'ailleurs, cela embarrassait tellement les écrivains, effectivement, que très souvent, ils préféraient m'écarter de l'intrigue. Une empathe saurait tout de suite le fin mot de l'histoire, avertirait tout le monde, et... fin de l'histoire, justement ! Alors, en ce qui me concerne, il n'y avait pas, donc, je ne sais rien. A un niveau personnel, et suivant l'exemple des acteurs de la première série qui ont eu la possibilité en quelque sorte de tirer leur révérence à l'écran, j'aimerais aussi avoir cette chance, au cours d'un prochain film. Faire nos adieux au public. Sinon, tout restera en suspens. J'ai toujours dit que je serais heureuse de continuer à tourner indéfiniment pour le cinéma, pour peu que mon personnage connaisse de nouveaux développements et évolue. Jusqu'à présent, nous avons réussi à toujours nous renouveler, et j'en suis ravie. »

Marina Sirtis Le succès des planches
 
En attendant, Marina devait se préoccuper de la suite de sa carrière. Peu après la sortie de Star Trek – Insurrection, elle s'est produite dans une pièce de théâtre de Neil Simon, « Hôtel Suite », à Philadelphie.
 
MS : « Ce fut un tabac! Il faut dire que j'adore le théâtre... Quel dommage que la production artistique ne soit pas aussi florissante à Los Angeles... Pour des raisons essentiellement matérielles, précise-t-elle. Au théâtre, on ne gagne vraiment pas assez pour vivre à Los Angeles. Et depuis la fin de Star Trek, je n'ai eu que des contrats sporadiques en dehors des films. II faut vraiment avoir un autre métier, par ailleurs, pour s'en sortir. Si je gagnais autant au théâtre qu'à la télévision, je brûlerais bien plus les planches ! J'aimerais tourner dans une autre série. Faire partie d'une saga et travailler à plein temps me plaît beaucoup. Savoir où on va la majeure partie de l'année, avoir un emploi stable et jouer un personnage pendant longtemps pour mieux en explorer toutes les facettes... En outre, figurer dans une série, sur du long terme, permet de ne pas déménager. Et mon foyer tient une très grande place pour moi. J'aimerais être à Los Angeles et voir tous les jours mon mari, mes animaux, fréquenter davantage mes amis... Quand on est jeune, ce style de vie nomade peut être agréable par certains côtés. Mais maintenant, je n'ai qu'une envie: retrouver le plus souvent possible mes pénates ! Il y a quelques années, j'appréciais davantage les voyages. Mais je suis souvent sur les routes pour des conventions ou autre, de toute façon. Alors dans la mesure du possible, je reste sur Los Angeles. Nous venons juste d'acheter un restaurant près du lac Arrowhead, ce qui fait que nous avons maintenant une gestion sur les bras.»
 
L'importance de la qualité
 
MS : « Beaucoup d'acteurs déclarent vouloir faire du cinéma et non de la télévision, parce que les rôles y sont plus fouillés, plus intéressants, et que c'est plus prestigieux. Je ne partage pas ce point de vue. Certains des films dans lesquels j'ai tourné étaient de vrais fours. Alors que Star Trek est du divertissement de haute qualité. Donc, peu importe la taille de l'écran. Seul compte la qualité du produit.»
 
Un groupe minoritaire

Marina a conscience que les rôles réservés aux femmes mûres sont plus rares que ceux destinés aux adolescentes ou aux toutes jeunes adultes.

MS : « Le NAACP [National Association for the Advancement of Colored People] souligne que les minorités ne sont pas représentées à la télévision, dit-elle. Mais à mon avis, une des premières minorités à en souffrir, ce sont justement les femmes qui ont passé 40 ans. Ce n'est donc plus une simple question de couleur de peau ou d'origine ethnique, mais de vieillissement! Et c'est inquiétant. D'un autre côté, j'ai le sentiment que ce genre de phénomène est cyclique. Il suffirait d'un succès retentissant mettant en scène un senior, ou une femme d'âge mûr, pour que la mouvance s'inverse. Quand on repense aux années 1980, où les actrices de Dynastie cassaient la baraque, tous les acteurs étaient largement d'âge mûr! Il n'y avait pas de gosses, ni de tout jeunes adultes, la vingtaine à peine, dans cette saga. Or, Dynastie créait la sensation à la télévision et remportait un succès fracassant! Alors, vous voyez, je suis persuadée que tout cela changera bientôt. »

Comme la plupart de ses collègues à Hollywood, Marina Sirtis est dans une forme physique éblouissante, et elle sait qu'elle doit le rester. Hélas, cela n'a rien d'évident.
 
MS : « Je voudrais tant pouvoir dire que je mange ce que je veux quand je le veux, sans avoir aussitôt à le payer... Mais ce serait faux! Je dois faire attention, surveiller de près mon régime alimentaire, et c'est ainsi. Autrement, je ne rentrerais plus dans ma combinaison spatiale, ce serait vite fait ! »
 
Deanna Troi - ST Enterprise en 2364 La dernière incursion de Marina dans l'univers de l'anticipation la voit de nouveau rejoindre Jonathan Frakes, cette fois dans le cadre de la grande finale de Star Trek - Enterprise, intitulée « Voici les voyages... », Où tous deux reprennent leur rôle de La Nouvelle Génération. Considérant l'avenir de Star Trek lui-même, Marina ajoute:
 
MS : « Je pense que ces dernières années, il y a eu un peu trop de merchandising et d'exploitation à tous crins de la licence. Une pause serait peut-être salutaire. Ce que nous ont appris les différentes séries jusqu'ici, c'est qu'il faut absolument entreprendre le voyage, s'ouvrir au monde et partir à la découverte de l'univers. »
 
Passer à la suite...
 
MS : « Venant de Star Trek Nouvelle Génération, je dirais qu'il faut en garder le meilleur évidemment, c'est-à-dire la belle alchimie qui existait entre les personnages. C'est sûrement l'essentiel. »
 
Quant à son personnage du Conseiller Deanna Troi, Marina déclare :

MS : « J'adorerais le reprendre et l'explorer en toute occasion, surtout que j'ai beaucoup plus d'assurance maintenant en raison de mon parcours émotionnel. Je viens de reprendre mon rôle, justement, dans Star Trek, mais à un certain niveau, je me suis faite à l'idée que, cette fois, c'était vraisemblablement fini, et que je devais continuer mon bonhomme de chemin. Mais soyons honnête: tout bien considéré, Star Trek aura probablement été la meilleure expérience de ma vie. »

Marian Sirtis - Dédicace.

 



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